- EAN13
- 9782382843727
- Éditeur
- Éditions des Équateurs
- Date de publication
- 10/01/2024
- Collection
- Littérature
- Langue
- français
- Langue d'origine
- français
- Fiches UNIMARC
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Papier - Équateurs 21,00
L’été venait de commencer quand je partis chercher les fées sur la côte
atlantique. Je ne crois pas à leur existence. Aucune fille-libellule ne
volette en tutu au-dessus des fontaines. C’est dommage : les yeux de l’homme
moderne ne captent plus de fantasmagories. Au XIIe siècle, le moindre pâtre
cheminait au milieu des fantômes. On vivait dans les visions. Un Belge pâle
(et très oublié), Maeterlinck, avait dit : « C’est bien curieux les hommes…
Depuis la mort des fées, ils n’y voient plus du tout et ne s’en doutent point.
» Le mot fée signifie autre chose. C’est une qualité du réel révélée par une
disposition du regard. Il y a une façon d’attraper le monde et d’y déceler le
miracle de l’immémorial et de la perfection. Le reflet revenu du soleil sur la
mer, le froissement du vent dans les feuilles d’un hêtre, le sang sur la neige
et la rosée perlant sur une fourrure de mustélidé : là sont les fées. Elles
apparaissent parce qu’on regarde la nature avec déférence. Soudain, un signal.
La beauté d’une forme éclate. Je donne le nom de fée à ce jaillissement. Les
promontoires de la Galice, de la Bretagne, de la Cornouailles, du pays de
Galles, de l’île de Man, de l’Irlande et de l’Écosse dessinaient un arc. Par
voie de mer j’allais relier les miettes de ce déchiquètement. En équilibre sur
cette courbe, on était certain de capter le surgissement du merveilleux.
Puisque la nuit était tombée sur ce monde de machines et de banquiers, je me
donnais trois mois pour essayer d’y voir. Je partais. Avec les fées.
atlantique. Je ne crois pas à leur existence. Aucune fille-libellule ne
volette en tutu au-dessus des fontaines. C’est dommage : les yeux de l’homme
moderne ne captent plus de fantasmagories. Au XIIe siècle, le moindre pâtre
cheminait au milieu des fantômes. On vivait dans les visions. Un Belge pâle
(et très oublié), Maeterlinck, avait dit : « C’est bien curieux les hommes…
Depuis la mort des fées, ils n’y voient plus du tout et ne s’en doutent point.
» Le mot fée signifie autre chose. C’est une qualité du réel révélée par une
disposition du regard. Il y a une façon d’attraper le monde et d’y déceler le
miracle de l’immémorial et de la perfection. Le reflet revenu du soleil sur la
mer, le froissement du vent dans les feuilles d’un hêtre, le sang sur la neige
et la rosée perlant sur une fourrure de mustélidé : là sont les fées. Elles
apparaissent parce qu’on regarde la nature avec déférence. Soudain, un signal.
La beauté d’une forme éclate. Je donne le nom de fée à ce jaillissement. Les
promontoires de la Galice, de la Bretagne, de la Cornouailles, du pays de
Galles, de l’île de Man, de l’Irlande et de l’Écosse dessinaient un arc. Par
voie de mer j’allais relier les miettes de ce déchiquètement. En équilibre sur
cette courbe, on était certain de capter le surgissement du merveilleux.
Puisque la nuit était tombée sur ce monde de machines et de banquiers, je me
donnais trois mois pour essayer d’y voir. Je partais. Avec les fées.
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